Garantie decennale et vice cache une clause annulee

Une clause de non-garantie des vices cachés ne peut pas exclure la garantie décennale

Avocat garantie decennale vice cache immobilier

Cass. Civ. 3ème, 19 mars 2020, n° 18-22.983


 

L’arrêt dont il est ici question est particulièrement important compte tenu de sa portée. Il est question de la vente d’une maison d’habitation, vraisemblablement moins de 10 ans après sa construction. Le notaire a inclus dans l’acte de vente immobilière une clause très courante selon laquelle le bien est raccordé à un système d’assainissement individuel (ou collectif le cas échéant pour les ventes d’appartements en copropriété) et que l’acquéreur prenait acte de cette situation et voulait en faire son affaire personnelle sans aucun recours contre quiconque. Or, précisément, les acquéreurs constatent un dysfonctionnement du réseau d’assainissement et ils agissent contre l’entrepreneur qui a réalisé ces travaux.

La clause de non-garantie des vices cachés

La clause précitée vise principalement à faire échec, en premier lieu, aux actions en garantie des vices cachés puisqu’elle est le plus souvent couplée avec une clause de non-garantie des vices cachés. Sauf dysfonctionnement dont le vendeur aurait connaissance avant la vente (ce qui serait un dol de nature à rendre la clause inefficace), cette clause peut s’interpréter en ce que les acquéreurs acceptent de renoncer à la garantie des vices cachés sur la foi de cette déclaration. Son efficacité est, disons le, toute relative. Soit le vendeur ignorait tout du vice latent qui affectait le réseau et la clause de non-garantie des vices cachés suffit à l’exonérer. Soit il avait connaissance du vice et la garantie des vices cachés est due indépendamment de toute clause de non-garantie.

L'interdiction des clause empêchant la garantie décennale

En revanche, et c’est ce que décide là Cour, cette clause ne peut être d’aucun effet en matière de garantie décennale du constructeur. La garantie décennale, dite usuellement « Dommage-Ouvrage » à raison de l’assurance obligatoire qui y est attachée, est d’ordre public et aucune clause contractuelle ne peut y faire échec (article 1792-5 du Code civil). Si une clause de non-garantie est stipulée, elle est réputée non-écrite. Une clause réputée non écrite est le quasi-équivalent d’une clause nulle ou annulée, ce qui signifie que la garantie est due malgré tout. La Cour de cassation considère que la clause qui exclut « tout recours contre quiconque » a pour effet d’exclure la garantie décennale et donc qu’elle est réputée non écrite. Or, en prononçant cette sanction, cela signifierait que la clause n’existe plus du tout, ni vis-à-vis du constructeur (c’est le sens même de cet arrêt), ni vis-à-vis du vendeur (c’est une conséquence prévisible de l’arrêt). Plus encore, le notaire n’avait à l’inclure dans l’acte puisqu’il est garant – en principe – de l’efficacité des clauses qu’il rédige. La portée de cette décision est majeure car ce type de clause figure dans tous les actes de vente ou presque. Les conséquences seront donc nombreuses.

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